Interview. Alain Okan Mboma : « Mon ambition est de montrer que les productions congolaises peuvent toucher le monde entier »

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Entrepreneur et fondateur de la société de production « Inrise Production », basée à Kinshasa, Alain Okan Mboma est l’auteur du dessin animé « Noah de Coco », entièrement conçu en République démocratique du Congo, et qui sera bientôt diffusé sur TV5Monde, Gully Africa et Trace TV. Objectif : utiliser un personnage de dessin animé pour faire connaître aux enfants du monde entier la grandeur des anciennes civilisations africaines et montrer que le continent peut redevenir une grande puissance.

Pourriez-vous vous présenter ?

Je suis Alain Okan Mboma, producteur de dessins animés, via ma société de production « Inrise Production », basée à Kinshasa, où se trouve la majeure partie de mon équipe opérationnelle. J’ai décidé de baser ma société à Kinshasa afin de mettre en avant le travail local et pour montrer qu’on est capables de faire nous-mêmes et pour nous-mêmes.

Je suis titulaire d’un Master en marketing digital, obtenu à l’ l’Institut des hautes études économiques et commerciales (INSEEC). Pendant 3 ans, j’ai travaillé au sein de la chaîne de télévision Trace TV dans le marketing digital et nouveau business. Par la suite, j’ai travaillé pour la chaîne Africa 24, en tant que responsable de la création de la chaîne musique. Entre-temps, j’avais déjà commencé à mettre en place « Inrise Production » que j’ai lancée il y a 2 ans.

Quelles sont les activités d’Inrise Production ?

Nous avons deux types d’activités. La première est la création de dessins animés : scénario, storyboard et l’animation en elle-même. Après avoir créé ces dessins animés, nous les vendons à des chaînes de télévision qui pourront les diffuser.

La deuxième activité concerne notre pôle digitale destiné à des particuliers : création de sites internet, formation dans le digital pour les jeunes à Kinshasa ou encore création d’applications ou de jeux.

Quelles sont les réalisations notables d’Inrise Production ?   

Pour l’instant, nous travaillons beaucoup plus avec des particuliers, notamment pour la création de sites internet. Notre première grande réalisation va être le dessin animé « Noah de Coco » que l’on va sortir dans les prochains mois et qui sera diffusé sur TV5Monde, Gully Africa sur le bouquet Canal+ et sur Trace TV.

Quelle est l’histoire de Noah de Coco ? 

Noah de Coco est l’histoire d’un personnage qui fait le tour des civilisations africaines, des royaumes ancestraux comme le royaume du Kongo, l’empire du Mali, le royaume du Fouta-toro au Sénégal, les Amhara d’’Ethiopie. Noah va repartir dans le passé pour montrer ces grands empires et royaumes qui ont existé, pour qu’on puisse apprendre à nos enfants et à ceux du monde entier ce qui s’est déroulé en Afrique. C’est une thématique qui est rarement soulevée et mise en lumière. Aujourd’hui encore, on ne connaît pas bien notre passé.

Comment est venue l’idée de la création de ce dessin animé ?

L’idée de « Noah de Coco » m’est venue il y a une quinzaine d’années. Je voulais créer une petite bande dessinée pour mes neveux et nièces, afin de les amuser. C’est ainsi que j’ai commencé à griffonner Noah.

Par ailleurs, quand j’étais petit, je me suis brûlé et j’ai passé beaucoup de temps à l’hôpital. Le jour où le personnage de Mickey est venu rendre visite aux enfants à l’hôpital m’a beaucoup marqué. J’avais deux ans à l’époque, mais je m’en souviens encore, comme si c’était hier. A partir de ce jour, j’ai senti l’envie également de créer un héros qui allait pouvoir rassurer les enfants malades. C’est une chose qui me tenait vraiment à cœur. Il y a 8 ans, j’ai organisé un évènement dans un hôpital à Marseille avec le personnage de Noah de Coco que j’ai présenté aux enfants. Même si le dessin animé n’était pas encore sorti, j’avais déjà le personnage. J’ai vu que cela avait marqué les enfants. Ce sont toutes ces raisons qui m’ont motivé à faire « naître » Noah.

Quels sont les messages que vous souhaitez faire passer ?

Mon mémoire de Master a été consacré aux royaumes ancestraux africains. Mais, on ne va pas pouvoir tout apprendre à un enfant en dix minutes (Durée de chaque épisode de la série). Mais, on peut lui apprendre des notions et des valeurs. L’idée principale est d’apprendre aux enfants que l’Afrique a été grande, qu’il y a eu des royaumes structurés, bien avant la colonisation, qu’il y a eu des grands rois et des grandes reines qui ont joué des rôles très importants dans l’histoire de notre continent. Dans chaque épisode, j’essaie d’apprendre quelques mots de la langue du pays dans lequel se déroule l’épisode. Par exemple apprendre à dire bonjour ou au revoir ou compter jusqu’à trois. Dans chaque épisode, j’essaie également de montrer un ou deux personnages historiques. Donc, en montrant que l’Afrique a été grande, on souhaite aussi dire qu’elle peut le redevenir et retrouver toutes ses lettres de noblesse. Comme je le dis toujours, il est plus facile de construire un enfant que de reconstruire un adulte.

Comment s’est fait le choix des royaumes présentés ?  

J’ai signé un contrat de 10 épisodes avec les chaînes de télévision. Donc, pour la première saison, je ne suis pas en mesure de présenter tous les royaumes d’Afrique. A cet effet, j’ai fait en sorte que chaque zone de l’Afrique soit représentée. Par exemple, l’empire du Monomotapa en Afrique australe (Zimbabwe et Mozambique) ; le royaume du Kongo, en Afrique centrale ; l’empire du Mali, en Afrique de l’Ouest et les Amharas, en Afrique de l’Est (Ethiopie). J’espère faire plusieurs saisons de plusieurs épisodes et que Noah de Coco pourra avoir le même succès qu’un dessin animé comme « Dora l’exploratrice ». J’ai l’ambition de produire pour Disney ou encore Nickelodeon, afin de montrer que les productions congolaises et africaines sont capables de toucher le monde entier. Aujourd’hui, partout dans le monde, on a envie de savoir ce qui se passe en Afrique. Pour preuve, les productions cinématographiques américaines liées à l’Afrique comme « The Woman King » ou « Black Panther »  qui ont eu beaucoup de succès. En plus de l’Afrique, Noah de Coco pourrait aussi faire le tour d’autres civilisations dans d’autres continents.

La série a été diffusée au MIP Junior du festival Cannes…

Oui, je coproduis Noah de Coco avec Trace TV et le dessin animé a été présenté au MIP Junior. Le MIP est un festival qui rassemble les professionnels du cinéma et de l’audiovisuel à Cannes. Ces derniers se rendent sur place pour s’informer des nouveaux projets dans le secteur, afin de les promouvoir. J’ai donc eu la chance que Noah de Coco y soit présenté.

Vous avez été récemment finaliste du concours « African Next Entrepreneurs ». En quoi consistait ce concours ? 

Le concours a été organisé par l’African Business Club (ABC), une institution basée en France et qui permet de mettre en avant les entrepreneurs africains et afro-descendants. Plus de 500 projets ont été sélectionnés. Par la suite, nous avons participé à un camp de formation, avant de présenter nos projets devant un panel d’experts. J’ai présenté Inrise Production ainsi que ma vision. J’ai été sélectionné parmi les 11 finalistes et j’ai finalement été classé troisième du concours. Cela me permet de bénéficier d’un accompagnement particulier et d’un investissement en faveur de ma société.

Quelle est la prochaine étape pour Inrise Production ?

Nous sommes déjà en train de travailler sur trois nouvelles productions sur des différents types de format. Un format court, destiné à un public plus adulte, avec des messages courts, pertinents et avec beaucoup d’humour. Ce sont des thématiques qui concerneront la vie des Africains du monde entier. On a également un format destiné aux 10-15 ans. En outre, nous continuons le développement de notre pôle de formation, afin de permettre à la jeunesse de se former aux différents métiers du numérique.

Patrick Ndungidi
Journaliste et Storyteller
https://africanshapers.com

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