Amadu Tidjane Baldé a été nommé par le président de la Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embalò, devenant ainsi le plus jeune président de la Cour des comptes de la Guinée-Bissau et le 13ème président de cet organe de contrôle des comptes publics.
Amadou Tidjane Baldé a prêté serment est entré en fonction le 27 juillet dernier. A cette occasion, il a déclaré que la Cour des comptes doit être plus agressive pour obliger toutes les entités publiques et le gouvernement à rendre des comptes en temps utile, puisque la loi détermine que tous les gestionnaires publics doivent rendre des comptes à cette institution. En outre, il a estimé que la Cour des comptes va poursuivre les infractions financières et appliquer la responsabilité des délits commis, parce qu’elle lutte contre la corruption et qu’il est désormais impératif que la cour des comptes juge et fasse respecter les responsabilités financières.
« La Cour des comptes doit agir comme une véritable Cour des comptes, et ne peut pas rester passive et indifférente alors que seulement moins de 5% des institutions de l’administration publique présentent un rapport chaque année… Je veux une Cour des comptes agissante, qui ne va pas faillir à son engagement juridique de juger et de faire respecter la responsabilité financière de la défaillance des gestionnaires de fonds publics », a fait savoir Amadu Tidjane Baldé.
« Je serais peut-être devenu un maître coranique »
Né à Bissau, capitale de la Guinée-Bissau, Amadu Tidjane Baldé est Titulaire d’une Licence en Droit de l’université de Bissau, obtenu en 2010. Avant ses nouvelles fonctions, il a été conseiller juridique à la Cour des comptes, directeur du service de contrôle préalable et directeur de cabinet du secrétaire d’État à l’énergie de Guinée -Bissau.
Marié et père de deux enfants, le nouveau président de la Cour des comptes de Guinée-Bissau a confié à la Deutsche Welle Africa, qu’il a failli ne pas aller à l’école dans son enfance. « Mon père voulait que j’étudie le Coran », a-t-il fait savoir, en précisant que c’est une voisine qui a convaincu son père de ne pas l’envoyer hors du pays. « Avant d’aller à l’école, entre six et sept ans, je savais déjà lire et écrire . Il y a eu beaucoup de résistance de mon père, mais ma voisine, qui est encore en vie, s’appelle Tante Mama, elle a tapé du pied jusqu’à ce que mon père soit convaincu et me laisse aller à l’école. Sans ça, je serais peut-être devenu un maître coranique », a déclaré Amadu Tidjane Baldé. Pour ce dernier, son enfance a été différente, car il était entouré de beaucoup de personnes plus âgées, ce qui, a-t-il expliqué lui a permis d’accumuler des expériences.
Rester en Guinée Bissau en pleine guerre
Adepte de lecture depuis son enfance, explique DW Africa, Amadu Tidjane Baldé a été contraint par son père à rester en Guinée-Bissau en pleine guerre pour continuer ses études. « C’était pendant le conflit politico-militaire du 7 juin [entre 1998 et 1999]. Ma mère et mes frères se sont réfugiés hors du pays, mais mon père a dit que je devais rester pour terminer mes études. Il est resté avec moi ici à Bissau, je ne suis allé nulle part, attendant juste la fin des hostilités et la reprise des cours, pour que je puisse continuer mes études », a expliqué le nouveau président de la Cour des comptes de Guinée Bissau. Ce dernier a toujours voulu étudier l’économie, mais s’est finalement tourné vers le droit, grâce à un ami. « Euclide a été mon mentor, dès mon plus jeune âge. Je ne sais pas pourquoi, il était après moi. C’est la personne qui m’a montré la faculté de droit de Bissau, m’a emmené et m’a forcé à m’inscrire. Ce que je voulais, c’était étudier l’économie, étudier le droit n’a jamais été mon intention. Euclide était une personne très présente dans ma vie et m’a beaucoup aidé à devenir ce que je suis aujourd’hui » , a-t-il expliqué.
Lorsque ses parents sont décédés en 2014, Amadu Tidjane Baldé est resté à Bissau pour s’occuper de ses frères et sœurs et a dû reporter à plus tard son projet de poursuivre ses études à l’université. Aujourd’hui, le nouveau président de la Cour des comptes de Guinée-Bissau suit un master en droit, à l’université de Lisbonne.
Surpris, mais calme
Amadu Tidjane Baldé a expliqué à DW Africa qu’il a été surpris par sa nomination. « Je prends mes nouvelles fonctions de manière naturelle et je suis vraiment calme. Je suis jeune, bien sûr, je sais que c’est un cas rare, qu’une personne âgée de 34 ans puisse assumer une fonction importante comme celle-ci dans notre pays – mais je suis calme et j’aborde la fonction avec un certain naturel », a-t-il indiqué, précisant qu’il y a encore beaucoup à faire dans l’institution, même si son prédécesseur a beaucoup fait pour l’élévation et l’affirmation de la Cour des comptes. « Il y a plus à faire pour l’affirmation de la Cour des comptes comme une véritable juridiction, ce qui suppose de juger, car près de 30 ans depuis sa création en novembre 1992, la Cour des comptes de la Guinée Bissau n’a jamais jugé une affaire. « Il y a un engagement qui a échoué, celui de juger et de faire respecter la responsabilité financière des gestionnaires de fonds publics, chaque fois qu’ils commettent une erreur », a souligné le nouveau président de la Cour des comptes.
Une source de motivation pour les jeunes
A son nouveau poste, Amadu Tidjane Baldé promet d’agir sur la base du plan stratégique quinquennal qui définit et guide les activités de la Cour des comptes, mais reconnaît que, pour mener à bien les tâches prévues, il est nécessaire de se conformer aux lois. Il estime également que sa nomination est une source de motivation pour les jeunes. « Je le vois comme un acte de renouveau, de transition générationnelle. Cela a créé une certaine attente et un espoir chez la jeunesse guinéenne »,a-t-il fait savoir à DW Africa. « Nous, les jeunes, devons travailler, fortifier nos bases techniques et scientifiques, pour pouvoir assumer des fonctions importantes dans l’État. Ce n’est pas une question d’âge, c’est question d’avoir une maturité technique, une maturité intellectuelle, le sens des responsabilités et le sens de l’intérêt général. Doté de toutes ces compétences , les plus grands n’hésiteront pas à faire appel aux plus jeunes. Le plus important est d’avoir les outils nécessaires pour exercer les fonctions », a-t-il conclu.