Publié le 21 novembre 2024, la neuvième édition du rapport « Africa Visa Open Index » (AVOI), qui analyse les politiques d’octroi des visas sur le continent africain, révèle que l’année 2024 a soufflé des vents contrastés sur le paysage de la mobilité africaine. Si 17 pays ont hissé leurs scores, laissant entrevoir un continent plus accessible, huit d’entre eux ont resserré leurs frontières, ajoutant des couches administratives ou des restrictions.
Les données de cette édition ont été collectées en juillet et août 2024. Comme pour toutes les éditions précédentes, la principale source de données et d’informations a été l’Association internationale du transport aérien (IATA).
Les résultats du rapport montrent une légère baisse de l’indice global, passant de 0,485 à 0,479, mais cela ne saurait masquer les avancées structurelles dans plusieurs régions. Certains pays ont osé des réformes : le visa électronique a progressé, rendant les préparatifs plus accessibles. D’autres, à l’inverse, ont opté pour des restrictions motivées par des enjeux sécuritaires ou économiques. Les conflits, omniprésents dans certaines régions, jettent une ombre sur les mouvements transfrontaliers, rappelant que l’aspiration à l’unité se heurte parfois à des réalités complexes.
2024 : Une année sous le signe du changement
L’année 2024 s’est révélée riche en transformations pour l’AVOI. Alors que 17 pays ont amélioré leur score, marquant une avancée significative vers une ouverture accrue, huit ont connu une régression, parfois due à des décisions politiques ou des contraintes sécuritaires. Malgré ces évolutions contrastées, le score global de 2024 (0,479) reste comparable à celui de 2022 et supérieur à ceux des années précédentes, témoignant d’une continuité dans l’engagement pour faciliter les déplacements intra-africains.
Certaines nations, portées par un souffle d’innovation, ont osé des réformes audacieuses dans le domaine des visas, tissant les prémices d’une harmonisation régionale. L’apparition des visas électroniques, tel un vent de modernité, a allégé les itinéraires administratifs de nombreux voyageurs, ouvrant l’accès à des pays africains avec la simplicité d’un clic. Pourtant, cette avancée technologique a parfois alourdi les processus pour certains citoyens.
Ailleurs, les horizons se sont resserrés. Les promesses d’accessibilité se sont effacées avec l’abandon du visa à l’arrivée dans des pays comme le Burkina Faso, le Togo ou le Tchad, préférant désormais les visas électroniques.
Top du classement
Dans le vaste éventail des politiques de mobilité, le Bénin, la Gambie, le Rwanda et les Seychelles occupent le top du classement, occupant tous fièrement la première place de l’Africa Visa Open Index. Ces nations pionnières, dans une volonté de solidarité continentale, accordent une exemption totale de visa à l’ensemble des citoyens des autres pays africains, un chiffre qui suggère que voyager au sein du continent reste encore une réalité en perpétuelle construction.
Derrière ces pays leaders, 16 des 20 premiers pays du classement se répartissent entre l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique de l’Est, chacune comptant huit représentants. Ce partage révèle l’élan commun de ces régions : une volonté d’ouvrir les frontières, de rapprocher les peuples malgré les défis qui jalonnent cette ambition. Cependant, chaque région joue sa propre partition. L’Afrique du Nord se fait discrète, représentée uniquement par la Mauritanie, tandis que l’Afrique australe affiche une présence notable avec Madagascar, Maurice et le Mozambique, rappelant que cette région demeure un acteur clé dans la quête de la mobilité africaine.
Une tendance intrigante se dégage : dix-huit de ces vingt premiers pays appartiennent à des catégories de nations à revenus moyen inférieur ou faible. Ainsi, souligne le rapport, cela suggère que les pays à faible revenu sont souvent plus enclins à adopter des régimes de visas libéraux. À l’inverse, plusieurs pays à revenu élevé s’accrochent à des politiques plus restrictives, craignant que l’ouverture ne devienne un appel d’air pour des migrations irrégulières ou une concurrence économique interne.
Cependant, il est essentiel de nuancer : l’ouverture mesurée par l’AVOI concerne avant tout les voyages occasionnels. Elle ne confère pas d’autres droits, tels que le droit d’entreprendre des activités commerciales ou d’élire domicile, indique le rapport. Cela démontre donc que si les barrières tombent, elles ne disparaissent pas toutes ; une liberté partielle est accordée, laissant aux nations le soin de définir leurs propres limites.
Par ailleurs, observe le rapport, deux des vingt premiers pays de l’indice, classés dans la catégorie des revenus moyens supérieurs (Maurice) et des revenus élevés (Seychelles), se distinguent comme des exceptions notables. Leur situation géographique d’États insulaires, fait savoir le document, joue un rôle déterminant dans leur politique d’ouverture, car ils ne sont pas confrontés aux mêmes dynamiques migratoires et défis logistiques que les pays dotés de frontières terrestres, ce qui leur permet d’adopter des régimes de visa distincts. En effet, cinq des vingt premiers pays de l’AVOI appartiennent à ce groupe d’îles (Cabo Verde, Comores, Maurice, Madagascar et Seychelles), où les politiques de visa varient entre exemption complète, visa à l’arrivée, ou une combinaison des deux.
À l’opposé, l’Afrique continentale, avec ses terres enclavées, révèle une autre facette de l’ouverture. Le Rwanda, le Burundi et l’Éthiopie, malgré l’absence de littoral, figurent parmi les pionniers de la mobilité africaine. Le Burundi, dans une démarche pragmatique, offre un visa à l’arrivée pour les citoyens de la majorité des nations africaines, à l’exception de ceux des six États membres de la communauté d’Afrique de l’Est (CAE), qui bénéficient d’un visa d’entrée gratuit et franchissent donc les portes du pays sans contrainte. L’Éthiopie, quant à elle, offre également un visa à l’arrivée à 46 pays africains, bien que quatre nations, qui bénéficiaient autrefois d’un visa à l’arrivée, sont désormais tenus de l’obtenir avant leur voyage.
Entrée sans visa : Une ambition partagée mais encore limitée
L’entrée sans visa reste un indicateur clé de l’ouverture. En 2024, 48 pays sur 54 offraient aux citoyens d’au moins un autre pays africain la possibilité de voyager sans visa, sans modification notable par rapport à l’année précédente.
Les politiques varient également selon le degré d’ouverture. Par exemple, 33 pays exemptent au moins 10 autres nations africaines de l’obligation de visa, et 42 étendent cette facilité à cinq pays ou plus. Ces chiffres, bien qu’encourageants, révèlent des disparités persistantes dans la mise en œuvre des politiques d’exemption.
Visas à l’arrivée : Une alternative en évolution
L’entrée sans visa demeure un baromètre essentiel de l’ouverture et de la volonté d’unir le continent. En 2024, 48 des 54 pays africains offraient à au moins un autre État africain la possibilité de voyager sans visa, un chiffre stable par rapport à l’année précédente, témoignant d’une progression ralentie mais constante.
Cependant, au-delà de cette constance, les nuances des politiques dévoilent des variations significatives. Ainsi, 33 pays accordent une exemption à dix nations ou plus, tandis que 42 élargissent ce privilège à un minimum de cinq États. Même si les efforts semblent réels, les données publiées par le rapport mettent aussi en lumière les fractures d’une dynamique inégalement répartie.
Vers une adoption croissante des visas électroniques
Par ailleurs, la numérisation trace également son sillon dans le paysage des politiques migratoires africaines, avec 26 pays proposant désormais l’obtention d’un visa électronique. Ce progrès marque une avancée significative, rendant les démarches plus accessibles et fluides pour les voyageurs, et reflétant une modernisation progressive des démarches, en phase avec les besoins d’un monde connecté.
Ci-dessous, le classement des pays africains dans l’AVOI 2024
- Bénin, Rwanda, Seychelles et Gambie se classent premiers, avec un score parfait de 1.000. Ces pays permettent à tous les citoyens africains d’entrer sans visa, illustrant leur engagement envers une mobilité totale sur le continent.
- Ghana se positionne à la cinquième place avec un score de 0.868, offrant une exemption de visa à 26 pays et un visa à l’arrivée pour 25 pays.
- Cap-Vert et Nigeria partagent la sixième place, avec un score de 0.864, offrant un visa à l’arrivée à 36 pays africains, tandis que 17 pays n’ont pas besoin de visa pour s’y rendre
- Guinée-Bissau, proposant un visa à l’arrivée pour 40 pays et une exemption pour 13, occupe la huitième place avec un score de 0.849, suivie de Mauritanie (score de 0.830) à la neuvième place. La Mauritanie propose un visa à l’arrivée à 45 pays, tandis que 8 pays sont exemptés.
- Maurice se trouve à la dixième position avec un score de 0.826, offrant l’exemption de visa à 27 pays, mais exigeant un visa préalable pour cinq pays et un visa à l’arrivée à 21 pays.
- Burundi est classé 11e avec un score de 0.823. Le pays offre une exemption de visa à six pays africains et un visa à l’arrivée pour 47 autres.
- Mozambique se positionne à la 12e place avec un score de 0.815, offrant une exemption à 12 pays et un visa à l’arrivée pour 39.
- Sierra Leone occupe la 13e place avec un score de 0.811, offrant une exemption à 15 pays et un visa à l’arrivée pour 35.
- Comores et Djibouti, partagent la 14e place avec un score de 0.800, proposant un visa à l’arrivée à tous les citoyens africains.
- Sénégal est 16e avec un score de 0.792, offrant une exemption à 22 pays et un visa à l’arrivée à 25.
- Madagascar et Somalie se classent 17e avec un score de 0.785, exemptant 52 pays, mais exigeant un visa préalable pour un seul pays chacun.
- Éthiopie est 19e avec un score de 0.732, offrant une exemption de visa à deux pays et un visa à l’arrivée pour 46.
- Tanzanie suit à la 20e place (0.706), offrant une exemption à 19 pays, un visa à l’arrivée pour 23, mais exigeant un visa préalable pour 11.
- Namibie est 21e avec un score de 0.653, autorisant 13 pays sans visa et offrant un visa à l’arrivée pour 27, tout en exigeant un visa pour 13.
- Malawi et Zimbabwe se partagent la 22e place avec un score de 0.472. Chacun offre une exemption à 17 pays et un visa à l’arrivée pour 10.
- Zambie est 24e avec un score de 0.430, exemptant 14 pays et offrant un visa à l’arrivée pour 11.
- Côte d’Ivoire est 25e (0.415), avec 22 pays exemptés et 31 nécessitant un visa préalable.
- Tunisie et Ouganda partagent la 26e place avec un score de 0.396, exemptant 21 pays, mais exigeant un visa pour 32.
- Mali se situe à la 28e place avec un score de 0.392, exemptant 20 pays, mais nécessitant un visa pour 32, tandis que les ressortissants d’un seul pays bénéficient d’un visa à l’arrivée.
- Guinée et Afrique du Sud sont 29e avec un score de 0.377, offrant des exemptions à 20 pays, mais demandant un visa à 33.
- Angola est 31e avec un score de 0.358, exemptant de visa 19 pays et en exigeant à 34
- Niger se classe 32e avec un score de 0.340, exemptant 18 pays et exigeant le visa à 35 Etats.
- Botswana, Burkina Faso et Eswatini occupent la 33e position avec un score de 0.321, chacun exemptant 17 pays et nécessitant un visa pour 36.
- Le Lesotho a un score de 0.302 et se classe 36ᵉ. Les ressortissants de 16 pays sont exemptés de visa pour s’y rendre tandis que ceux de 37 pays doivent l’obtenir.
- Le Tchad et le Togo ont chacun un score de 0.283, occupant ensemble la 37ᵉ position, avec 15 pays exemptés de visa pour s’y rendre
- Le Liberia, avec un score de 0.264, se classe 39ᵉ, avec 14 pays exemptés de visa.
- La République centrafricaine affiche un score de 0.245 et occupe la 40ᵉ position. Les ressortissants africains de 40 pays doivent détenir un visa pour y voyager tandis que ceux de 13 pays en sont exemptés.
- La République du Congo a un score de 0.215, occupant la 41ᵉ place, avec seulement 5 pays exemptés de visa, 8 devant obtenir un visa à l’arrivée et 40 pays à qui il est exigé un visa à tous les citoyens.
- Le Gabon a un score de 0.170, occupant la 42ᵉ position. Les ressortissants de 44 pays africains doivent obtenir un visa avant de voyager, tandis que ceux de pays en sont exemptés.
- Le Maroc et Sao Tomé-et-Principe, chacun avec un score de 0.151, se classent à la 43ᵉ place. Ces deux pays exigent un visa à 45 pays africains et seulement 8 sont exemptés.
- La République démocratique du Congo se situe à la 45ᵉ position avec un score de 0.121. Seulement 4 pays africains sont exemptés de visa, 3 bénéficient du régime de visa à l’arrivée et les ressortissants de 46 Etats africains doivent obtenir un visa avant de s’y rendre
- L’Algérie, le Cameroun et le Kenya ont un score identique de 0.113, partageant la 46ᵉ place. Ces pays exigent un visa aux ressortissants de 47 pays africains, tandis que ceux de 6 pays seulement son exemptés.
- L’Égypte est classée 49ᵉ avec un score de 0.106. Le pays des pharaons fait bénéficier le régime de visa à l’arrivée à 6 Etats africains, tandis que les habitants de 46 pays ont l’obligation de visa pour s’y rendre.
- Le Soudan du Sud a un score de 0.087 et occupe la 50ᵉ position, avec uniquement 3 pays exemptés et de visa et 2 bénéficiant du visa à l’arrivée. Les habitants des 48 autres pays africains doivent obtenir un visa avant leur voyage.
- L’Érythrée a un score de 0.068 et se classe 51ᵉ, avec seulement 2 pays exemptés de visa, 2 autres bénéficiant du visa à l’arrivée et 49 pays soumis à l’obligation de visa.
- La Guinée équatoriale et la Libye ont un score de 0.038, occupant ensemble la 52ᵉ place. Ces pays exigent chacun un visa obligatoire aux ressortissants de 51 Etats africains, tandis que ceux de deux pays seulement sont exemptés de visa.
- Le Soudan se situe en dernière position, à la 54ᵉ place, avec un score de 0.030. Seuls deux pays bénéficient du visa à l’arrivée, tandis que les habitants de 51 pays doivent avoir un visa avant tout voyage.