Regional Chief Operating Officer chez Allianz Africa, basée à Abidjan, Delphine Maidou Traore est responsable des activités liées au développement commercial et aux opérations en Afrique de l’assureur allemand.
Africanshapers : quelle est l’envergure d’Allianz Africa sur le continent, dans quels pays êtes-vous présents et qu’est-ce qui justifie le choix de votre présence dans ces pays ?
Delphine Maidou Traore : le groupe Allianz est présent dans 16 pays sur le continent. Allianz Africa opère dans 14 pays et collabore étroitement avec Allianz Egypte, AGCS Afrique du Sud et Euler Hermès au Maroc. Allianz Africa possède des filiales dans les pays suivants : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo (Brazzaville), Côte d’Ivoire, Ghana, Kenya, Madagascar, Mali, Maroc, Nigéria, Sénégal et Togo.
Nous sommes présents sur le continent depuis 1912. Les filiales francophones faisaient historiquement partie du réseau AGF, anciennement piloté par Paris et nous avons récemment ouvert une filiale au Kenya et une entité VIE au Ghana. Nous avons également acquis deux nouvelles entités sur deux marchés à potentiel avec le rachat de Zurich Maroc et d’Ensure Insurance au Nigeria.
En quoi consiste votre travail comme COO et quel bilan faites-vous de vos activités depuis votre prise de fonction ?
Lors de ma prise de fonction, mes premiers objectifs ont été de consolider et restructurer les activités de souscription, de réassurance, de ressources humaines, de marketing et de communication. Avec le soutien de mon équipe, nous cherchons à augmenter la visibilité d’Allianz sur le continent. Un travail que nous avons initié et qui se poursuit. En parallèle, nous sommes en phase de transformation complète de nos systèmes informatiques dans toutes nos filiales. Il s’agit d’un projet conséquent qui prendra quelques années mais qui est indispensable à notre développement.
Quelle est la particularité de l’offre d’Allianz en Afrique ?
En tant qu’acteur global, nous apportons une offre complète sur le marché appuyée par une forte capacité de souscription et une expertise reconnue mondialement. Allianz a une large gamme de produits d’assurance automobile, santé, transport ou d’assurances vie. Allianz a pour volonté de s’adapter au mieux aux besoins de tous ses clients, à la fois pour les particuliers, les entreprises (internationales ou PME) ou pour son million de micro-assurés. Avec le soutien d’Euler Hermes et d’AGCS, nous sommes capables de souscrire l’ensemble des risques rencontrés par nos clients, particuliers comme entreprises.
Vous aviez été CEO d’Allianz Global Corporate & Specialty (AGCS) et aujourd’hui vous êtes COO d’Allianz Africa. Quelle est la différence entre ces deux fonctions ?
La plus grande différence concerne surtout le périmètre. En tant que CEO d’AGCS, mon rôle était centré sur de développement de l’Afrique de sud. En tant que COO d’Allianz Africa j’occupe des fonctions régionales sur 14 pays et gère aussi la collaboration avec les autres entités du groupe Allianz qui opèrent en Afrique.
Quel est aujourd’hui le taux de pénétration de l’assurance en Afrique au vu du potentiel du marché ? Avez-vous des chiffres précis à ce sujet ? Aujourd’hui, seule l’Afrique du Sud a un marché de l’assurance conséquent en volumes de primes d’assurance, représentant entre 75 et 80% des primes générées sur le continent, et un taux de pénétration particulièrement élevé de 11,5% en assurance-vie [d’après le Baromètre 2018 de l’assurance en Afrique, publication de l’OAA, Organisation des Assurances Africaine, publication à laquelle Allianz a participé]
Sur le reste du continent, en 2016, les taux de pénétration en assurance vie et en assurance non-vie étaient principalement inférieurs à 1%, à l’exception de quelques marchés (Kenya, Maroc, Tunisie, Namibie et Maurice). Ces chiffres prouvent l’immense potentiel de développement de l’assurance sur le continent, avec des acteurs qui désirent exploiter l’émergence de certains pays, Maroc, Nigéria, Kenya ou encore Côte d’Ivoire, principalement tirée par l’émergence annoncée d’une classe moyenne, estimée à environ 350 millions de personnes selon une étude récente de la Banque Africaine de Développement (BAD).
Quel est le potentiel de croissance du secteur des assurances en Afrique ? Quel est le meilleur moyen de faire progresser ce taux de pénétration et quel rôle Allianz Africa joue-t-il à ce sujet ?
Le potentiel de croissance des assurances sur le continent est immense et ces dernières années, les opérations de fusions-acquisitions se multiplient, à l’image de ce que font Allianz et Sanlam, pour proposer une offre panafricaine. Il existe beaucoup de leviers pour accroître le taux de pénétration d’assurance dans nos pays. En augmentant le pouvoir d’achat, les populations évoluent naturellement vers des dépenses secondaires qui incluent des produits d’assurance. Allianz Africa lance également plusieurs initiatives pour atteindre les populations non-assurées à travers particulièrement de la micro-assurance, avec par exemple des produits d’assurance agricole au Mali et au Burkina Faso.
Un des enjeux principaux demeurent la défiance des particuliers vis-à-vis des compagnies d’assurance, qui ont longtemps eu l’image de compagnies encaissant les primes et ne payant pas les sinistres. Chez Allianz, nous tentons au quotidien, et dans chacune de nos entités d’atteindre une excellence opérationnelle qui nous permet d’écouter nos clients, de satisfaire leurs besoins de couverture et de les accompagner en cas de sinistre. Nous sommes convaincus que c’est par ce moyen que nous arriverons à changer l’image des assureurs et de regagner la confiance de nos clients.
En mai 2018, Allianz a acquis 8% d’Africa Ré. Quelle est l’importance d’une telle acquisition pour Allianz ainsi que d’autres acquisitions que vous avez opéré sur le continent ?
Cette prise de participation est un jalon supplémentaire dans notre stratégie d’expansion en Afrique, tout comme l’acquisition de Zurich Maroc et de Ensure Insurance au Nigéria, deux marchés à fort potentiels sur le continent.
Quels sont aujourd’hui les enjeux et les défis du secteur des assurances en Afrique ?
En tant qu’assureur, notre rôle premier est d’éduquer les populations sur l’importance de l’assurance dans le quotidien et des risques existants. Nous avons affaire à une population avec des revenus limités et souvent peu d’accès à un compte en banque. L’innovation est la clé, il nous faut trouver des moyens pour toucher ces populations et leur proposer des offres et des tarifs adaptés à leur situation financière.
Quelle est la journée type de Delphine Maidou ? Qu’est-ce qui vous motive au quotidien ?
Je n’ai vraiment pas de journée type. Il y a des jours que je passe dans l’avion, voyageant sur le continent africain ou entre l’Afrique, l’Europe et l’Asie. Il y a des jours que je passe en réunions avec mes équipes, collaborateurs ou partenaires. Je participe aussi à plusieurs conseils d’administration de nos filliales ou d’autres entités externes comme Africa Risk Capacity ou la Societe Générale en RCI. Je passe aussi beaucoup de temps à interviewer des talents pour les intégrer à nos équipes. C’est surtout cette dernière partie que me motive : comment encourager les jeunes à potentiel à rejoindre un groupe comme Allianz, et ensuite les voir s’épanouir au sein de la compagnie
Vous aviez été la première femme noire à présider l’institut des assurances de l’Afrique du Sud. Comment avez-vous vécu cette expérience ?
Mon expérience en Afrique du Sud a eu vraiment un grand impact sur ma vie professionnelle et ma carrière. Etant l’une des seules femmes dirigeantes d’une entreprise financière dans le pays, et me faire accepter en tant que femme noire dans cet environnement a été un réel défi pour moi. Aussi, c’était important pour nous de revitaliser la marque Allianz dans le pays après plus de 10 ans de silence. J’ai pu m’entourer d’une équipe locale très dynamique avec qui nous avons réussi à prendre des parts de marche très importantes sur les gros risques industriels à travers l’Afrique.
Quel lien gardez-vous avec votre pays d’origine le Burkina Faso ?
Mon père et ma sœur y vivent, ma mère ainsi que mes grand parents avec qui jetais très liée y reposent. C’est pourquoi je m’y rends une à deux fois par an avec mes enfants. Nous allons aussi au village de Orodara pour nous ressourcer un peu. J’aimerais pouvoir faire beaucoup plus pour le pays. En ce moment je suis la marraine du Forum de leadership féminin qui a lieu chaque année. Le but essentiel est de supporter les jeunes filles qui y participent et les accompagner dans la réalisation de leurs objectifs de carrière et l’accomplissement de leurs rêves.
Quels sont les projets d’Allianz Africa sur le continent ?
Nous avons renforcé notre équipe de souscription, d’informatique, de communication, de contrôle interne au niveau régional et de ce fait créé un réel pôle d’expertise en Afrique, basé à Abidjan. Nous avons également mis en place une équipe de distribution pour travailler sur nos programmes internationaux, en relation avec AGCS. Nous avons réorganisé nos hubs pour assurer une présence de proximité avec nos marchés. Aujourd’hui, nous souhaitons asseoir notre présence sur nos marchés et étudions des possibilités sur les autres marchés sur le continent.
Bio Express
Âge:44
Source d’inspiration: ma mère et mon père
Livre de chevet: la Bible, « Long walk to freedom » de Nelson Mandela
Si vous aviez exercé un autre métier: Esthéticienne, propriétaire d’un spa aux produits naturels
Citation préférée? « Les gens oublieront ce que vous avez dit, ils oublieront ce que vous avez fait, mais il n’oublieront jamais ce que vous leur avez fait ressentir » Maya Angelou
Loisirs ? Je voyage beaucoup et j’ai beaucoup de responsabilités, donc rien de mieux que de se lever le matin et de ne pas avoir à aller quelque part ou prendre une décision quelconque. Pouvoir rester dans mon jardin et ne rien faire.