Falilou Diop et Rindra Harizo lauréats du prix 2022 de l’AHJUCAF pour la promotion du droit

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Le sénégalais Falilou Diop, 33 ans, est le lauréat du Prix 2022 de l’association des hautes juridictions de cassation francophones (AHJUCAF), tandis que la malgache Rindra Randriamahefarilala Harizo, 32 ans, a obtenu la mention spéciale de ce prix.  Leurs prix respectifs leur ont été décernés  le vendredi 21 octobre à la Cour de Cassation française.

Le prix a été remis par le premier président de la Cour de cassation française, Christophe Soulard et le premier président de la Cour suprême béninoise, Victor Dassi Adossou, à l’occasion de la réunion du bureau de l’association des hautes juridictions de cassation francophones (AHJUCAF) qui s’est tenue le même 21 octobre.  La cérémonie a été organisée en présence de la présidente du jury du concours Florence Aubry-Girardin de la Cour fédérale Suisse, qui a présidé un jury mixte de magistrats et d’universitaires. La thèse primée fera l’objet d’édition et de diffusion.

Les lauréats et quelques membres du jury

L’AHJUCAF  regroupe les juridictions suprêmes de l’ordre judiciaire des pays francophones. Le prix récompense les travaux d’ouvrage ou de thèse qui contribuent à la promotion de l’Etat de droit et de justice dans l’espace francophone. L’AHJUCAF réunit une cinquantaine de Cours suprêmes judiciaires francophones.

Une thèse d’une grande qualité formelle

Le jury de l’édition 2022 du Prix de l’AHJUCAF pour la promotion du droit s’était réuni le 29 juin 2022 à Cotonou (Bénin), la veille du VIIème Congrès de l’AHJUCAF. A l’unanimité, le Prix 2022 de l’AHJUCAF pour la promotion du droit a été décerné au sénégalais Falilou Diop pour sa thèse : « Uniformisation du droit de la propriété intellectuelle et conflits de lois dans l’OAPI », réalisée sous la direction d’Edouard Treppoz, professeur à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, soutenue à l’université Jean Moulin Lyon 3, le 23 novembre 2021.

Le jury du s’était réuni le 29 juin 2022 à Cotonou, au Bénin

Le jury a indiqué que la thèse de doctorat du jeune et brillant juriste sénégalais était « une recherche d’une grande qualité formelle » . « Elle traite de façon théorique et pratique de la question de l’uniformisation du droit en général dans un espace géographique déterminé, confrontée au droit international privé de la propriété intellectuelle. M. Diop propose des solutions pratiques pour réguler les conflits de lois au sein de l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) », a indiqué le jury.

Falilou Diop bénéficie d’une aide à l’édition d’un montant de 3.000 euros pour l’ouvrage qui sera issu de cette recherche.

Falilou Diop, âgé de 33 ans, qualifié par le CNU, est actuellement Maître de conférence à l’université Jean Moulin Lyon 3. En 2015, il était Jurist stagiaire au sein de la filière        ingénieur entreprendre            (FIE Lyon Tech) de  l’institut  National des sciences    appliquées (INSA-Lyon), propriété intellectuelle/droit des technologies numériques.

De 2011 à 2014, Falilou Diop était responsable adjoint de  la commission pédagogique du   Club OHADA (Organisation pour l’harmonisation en Afrique du Droit des affaires) de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.

Falilou Diop est titulaire d’un Doctorat en droit privé, mention droit international privé de l’université Jean Moulin Lyon 3 ; d’un Master 2 droit  de la propriété intellectuelle de l’université Jean Moulin Lyon 3 ; et d’un Master 1 en droit des affaires de l’université Cheick Anta Diop de Dakar.

Justice pénale à Madagascar

Une mention spéciale a été attribuée à Rindra Randriamahefarilala  pour sa thèse sur la justice pénale malgache soutenue à Montpellier le 14 décembre 2021 et intitulée « La justice pénale malgache : entre l’héritage colonial et le droit au procès équitable ». La thèse a été réalisée sous la direction d’Olivier Sautel, professeur à l’Université de Montpellier. Elle est la première malgache récompensée pour ce prix.

Rindra Harizo reçevant son prix des mains de Christophe Soulard, premier président de la Cour de cassation française

Dans cette thèse de 345 pages, Rindra Harizo retrace l’évolution de la justice pénale malagasy à partir de la colonisation, en la mettant en rapport avec le standard international du droit au procès équitable. Dans cette entreprise, l’auteure souligne les avancées incontestables au fil du temps et met aussi en exergue les maux du système à travers l’analyse du pouvoir réel du juge, l’écart entre la loi et la pratique et le mépris du citoyen envers la justice. Après une remise en perspective historique de la justice malgache, la thèse dresse un tableau sans complaisance de la justice pénale malgache avec ses avancées quant aux principes du procès équitable dans les textes mais aussi ses réalités face à la sous-administration judiciaire, au manque de moyens, à la corruption et à la défiance des citoyens.

Le jury a souligné la rareté des recherches universitaires sur la justice malgache et souhaité que la jeune juriste d’avenir puisse voir ses travaux publiés avec le soutien de l’AHJUCAF.

Juge d’instruction et enseignante

Rindra Harizo est titulaire d’un doctorat en droit privé et sciences criminelles de l’université de Montpellier ; d’un Master 2 en droit international de l’université de Limoges ( une formation à distance via l’Agence Universitaire Francophone.) ainsi que d’une maîtrise en droit et gestion de l’environnement de l’université de de Fianarantsoa, où elle a été majore de promotion à l’entrée et à l’obtention du diplôme. Lors du concours pour la magistrature, elle est également sortie majore de sa promotion de magistrats judiciaires en 2013.

Rindra Harizo est aussi certifiée de l’institut international des droits de l’Homme de Strasbourg et a été sélectionnée parmi les 20 lauréats bénéficiant de la formation à l’académie de droit pénal international de Nuremberg (Allemagne), pour sa deuxième promotion francophone (2021).

Comptabilisant 10 ans de magistrature, Rindra Harizo est, depuis juin 2020, juge d’instruction au pôle anti-corruption à Madagascar, en charge des infractions de corruption et assimilés, des infractions économiques et des infractions financières. De 2018 à 2020, elle a été juge d’instruction à la tête de la direction d’enquête sur les affaires complexes. De mai 2013 à janvier 2018, elle a été juge au tribunal de première instance de Tamatave, ville portuaire située sur la côte est de Madagascar.

Rindra Harizo enseigne le droit commercial à l’université de Fianarantsoa. Elle mène quelques travaux de recherche centrés essentiellement sur la Justice malgache, dont les derniers résultats, portant sur le statut du juge à Madagascar, ont été présentés à l’Académie malgache des sciences et des lettres, le 9 juin 2022.

Soutenance de thèse de Rindra Randriamahefarilala

Représentante d’associations de droit

Depuis août 2022, Rindra Harizo est la représentante de l’association pour l’Unification du Droit en Afrique (UNIDA/OHADA.com). Parmi ses premières missions , elle codirige, avec Olivier Bustin, avocat, docteur en droit de l’université Paris Panthéon-Assas, enseignant au diplôme Interuniversitaire OHADA des universités Paris Panthéon-Assas et Sorbonne Paris Nord, la réalisation d’un ouvrage de droit comparé des affaires Madagascar-OHADA.

Depuis janvier 2022, Rindra Harizo  est la représentante de l’association ACP Legal Océan Indien à Madagascar. L’association travaille sur  Mayotte, les Comores et Madagascar sur un grand projet de formation en droit de la régionalisation économique. Ce projet inclut un volet de formation des professionnels et une formation initiale en Master 2 en droit de l’intégration économique régionale, dispensé à Madagascar, le premier de son genre en Afrique.

Rindra Harizo avec le premier président de la Cour de cassation française, Christophe Soulard et le premier président de la Cour suprême béninoise, Victor Dassi Adossou

Vulgarisation du droit et des procédures judiciaires

Rindra Harizo est aussi la créatrice de « Lalàna sy Fitsarana » (Droit et Justice), plateforme digitale qui œuvre dans la vulgarisation du droit et des procédures judiciaires à Madagascar. La page Facebook, du même nom, procède à des explications des points de droit en malgache. Elle a une vocation d’éducation citoyenne, destinée à des cibles à bas niveau d’instruction. La page compte aujourd’hui plus de 25 mille abonnés. Depuis une année, plusieurs magistrats , à travers cette page, partagent des tutoriels gratuits de préparation au concours d’accès à la magistrature.

« Le Droit n’est pas un métier, c’est une vocation, et surtout une manière d’être. On n’étudie pas le Droit pour faire du Droit, on étudie le Droit pour prévenir les conflits, le cas échéant, pour aider à leur résolution de manière pacifique. Il faut adhérer à cette noble considération de ce qui sera votre rôle dans une société, aujourd’hui, en forte juridicisation de tous ses secteurs. De cette considération naît la passion du Droit, et de la passion naissent la curiosité et l’effort, incontournables pour réussir vos études », a déclaré Rindra Harizo au cours d’une interview avec codepenalsn.com

Le jury du Prix de l’AHJUCAF 2022 était composé de :
– Mme Florence AUBRY GIRARDIN, Présidente de la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral de Suisse, Vice-présidente de l’AHJUCAF, élue présidente du jury
– M. Sourou Innocent AVOGNON, Président de la chambre judiciaire de la Cour suprême du Bénin, représentant M. Victor Dassi ADOSSOU, Président de la Cour suprême du Bénin, Vice-président de l’AHJUCAF
– M. Jean-Paul JEAN, Président de chambre honoraire à la Cour de cassation de France, Secrétaire général de l’AHJUCAF, Rapporteur
– Mme Elise ZAHI, Attachée de programme à la Direction des Affaires politiques et de la gouvernance démocratique, représentant l’Organisation internationale de la Francophonie (en visioconférence depuis Paris)
– Mme Tatiana DEKADJEVI, Enseignante chercheure à l’Université d’Abomey-Calavi (Bénin)
– M. Fabrice HOURQUEBIE, Professeur de droit public à l’Université de Bordeaux (en visioconférence depuis Paris)
– M. El Hadji Malick SOW, Président de chambre honoraire, chargé de mission régional de l’AHJUCAF, représentant M. Cheikh Ahmed Tidiane COULIBALY, Président de la Cour suprême du Sénégal, Vice-président de l’AHJUCAF

 

Patrick Ndungidi
Journaliste et Storyteller
https://africanshapers.com

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