Interview. Edwine Endundo: « J’aime les challenges et la diversité dans le travail »

Actu à la Une

Nommée directrice générale de Vlisco RDC en mars 2020, à l’aube de la pandémie, Edwine Endundo a réorienté sa carrière professionnelle, en passant du statut d’avocate à celui de directrice régionale d’une marque internationale de textile. Tous les objectifs qu’elle s’était assigné à sa prise de fonction, ont été atteints. Vlisco RDC a enregistré un résultat bénéficiaire en 2021, pour la première fois depuis son existence.

Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?

Edwine Endundo, 37 ans. Je suis l’heureuse maman de deux enfants.  Je suis titulaire d’un master en droit public de l’ULB, et d’un master en droit international des affaires de King’s College.  J’ai été avocate aux barreaux de Bruxelles et de Kinshasa Gombe avant de rejoindre Vlisco Congo.  Je suis une passionnée de lecture, de politique et ai développé une récente passion pour l’art congolais.

Vous êtes passée d’un cabinet d’avocats à directrice d’une entreprise textile. Pourquoi avoir choisi de rejoindre Vlisco RDC et comment s’est déroulée cette transition du droit vers le management d’une entreprise textile ?

Je suis une femme qui aime les challenges et la diversité dans le travail. Après près de 7 ans dans le monde de l’avocature, j’ai ressenti le besoin de me réinventer professionnellement en relevant de nouveaux défis.  La proposition de prendre la tête de Vlisco RDC est donc arrivée à point nommé.  Mon choix s’est porté sur Vlisco Congo car cette fonction me permettait d’évoluer dans une entreprise leader dans le secteur de la mode et m’offrait la possibilité de relever le défi de démontrer que la RDC était un marché à haut potentiel regorgeant de talents et de cadres congolais capables de travailler selon les standards internationaux. En outre, quitter le monde de l’avocature pour une entreprise commerciale m’offrait la possibilité d’ appartenir à une société, et à ne défendre que les intérêts de celle-ci.  Cette transition a nécessité l’acquisition rapide de certaines connaissances et donc un travail acharné. J’ai, cependant, eu la possibilité de m’appuyer sur le support constant du groupe et de celui de mon mentor et prédécesseur M. Eric Loko.

Pourriez-vous nous décrire votre travail au quotidien au sein de votre entreprise ? Vos missions et votre environnement de travail ?

Ma fonction commande une appréhension et une implication dans le travail des 6 départements que composent Vlisco Congo.  En outre, ma fonction requiert une communication régulière avec différents interlocuteurs du siège, tant en ce qui concerne le reporting que les discussions et ajustements stratégiques. Mes journées sont donc divisées entre les questions opérationnelles urgentes et importantes, les séances de reporting avec le siège, et les échanges avec les divers membres de mon équipe.  Je peux aussi bien passer une matinée à penser stratégie marketing et un après midi à m’enquérir de la localisation de notre stock et terminer la soirée en discutant de la situation du marché  autour d’un dîner avec une cliente.

Il m’arrive également de voyager aussi bien à l’intérieur de notre beau pays pour rencontrer nos différents revendeurs que dans l’Afrique en général pour rencontrer mes homologues des autres pays.

Vous êtes devenue directrice de Vlisco/RDC, en mars 2020, au début de la pandémie. Comment vous-êtes-vous adaptée à cette situation exceptionnelle ? Et quelles ont été vos priorités lors de votre prise de fonction ?

Ma première priorité a naturellement été celle de faire un état des lieux de Vlisco Congo tant au niveau commercial qu’au niveau financier. Les priorités qui s’en sont dégagées étaient la nécessité de déstocker nos distributrices et notre marché, la nécessité d’assainir la situation financière de Vlisco Congo ; la reconsolidation de notre réseau de distribution et la reconstitution d’une équipe dynamique.

La pandémie a bousculé cet agenda. Cette prise de fonction a démarré sur les chapeaux de roue dans un climat d’incertitude mondiale.

La résilience de notre réseau de distribution, quasi exclusivement composé de femmes, m’a agréablement surprise. Nous avons pu compter sur la collaboration, sans faille, de nos distributrices et avons pu mener à bien les réformes commerciales nécessaires.  En ce qui concerne ma nouvelle équipe, la priorité était de connaître chaque personne et de mettre un nom sur un visage ; créer cette proximité avec chacun est ma manière de fonctionner.  Les objectifs découlant de ces priorités ont tous été atteints. A titre illustratif, en 2020, nous avons assaini le marché par une politique de déstockage et avons réussi à pérenniser les bienfaits de cette situation par une politique de commande et de gestion des stocks strictement contrôlée durant l’année 2021.

Quelle est aujourd’hui l’envergure de Vlisco RDC ? Chiffre d’affaires, nombre d’employés, etc. ?

Vlisco emploie directement 22 personnes. De nombreux emplois indirects découlent cependant des opérations de Vlisco en RDC. Magasiniers, gérants de boutiques, tailleurs, comptables. L’écosystème de Vlisco Congo est difficilement mesurable mais est, en tout état de cause, bien plus vaste que ce que présente notre organigramme.

Compte tenu de nos ambitions d’expansion, nous projetons la création de 2 départements durant l’année 2022. Vlisco Congo distribue ses produits essentiellement en RDC ; nous ambitionnons, cependant, d’étendre notre marché vers d’autres pays du cluster couvert par Vlisco Congo.

Le marché du textile est en perpétuelle évolution, comment pensez-vous accompagner Vlisco RDC dans ce contexte ?

Vlisco existe depuis plus de 175 ans et c’est là que réside notre force ! Nos techniques de production et notre savoir-faire, les relations particulières que nous entretenons avec nos distributrices et avec notre clientèle constituent un avantage comparatif. Une concurrence saine et loyale est un élément positif qui pousse chacun à l’innovation et à l’excellence.

Le groupe Vlisco réfléchit constamment à la meilleure manière de surprendre ses consommateurs. C’est ainsi que de nouveaux produits, différents de notre best-seller le Grand Super Wax sont régulièrement conçus et distribués par le groupe Vlisco. Cette constante innovation doit cependant faire face à un fléau qu’est la concurrence déloyale de certains opérateurs économiques, mais également à celui de la contrefaçon.

La contribution de la RDC au maintien de la marque Vlisco comme leader du marché passera par des actions visant à confirmer la position de Vlisco comme produit de luxe. Cette matérialisation s’opérera au travers de la poursuite de notre accompagnement de notre réseau de distribution dans l’amélioration drastique du paysage « retail » de Vlisco. Nous souhaitons offrir une expérience shopping à nos consommateurs conforme aux standards internationaux du luxe.

Quelle est la journée type d’ Edwine Endundo en tant que Directrice de Vlisco/RDC et quelles sont vos habitudes de travail ?

Mes journées commencent vers 5H30 par une séance de sport ou de yoga/relaxation ou lecture.

Passer du temps avec moi-même et puis, avec mes enfants et tout cela avant 8h00 du matin, me donne l’énergie pour affronter n’importe quel défi que ma casquette de directrice mettra sur mon chemin durant la journée. Comme je l’ai indiqué, aucune journée ne se ressemble, mais je mets un point d’honneur à avoir des contacts quotidiens avec mes collaborateurs les plus proches.

Quelles sont vos motivations quotidiennes dans votre travail?

Ma motivation première est mon patriotisme. Je souhaite que les résultats de Vlisco Congo témoignent d’une excellence constante, d’une intégrité sans faille et d’un sens élevé d’innovation. Ma seconde motivation est celle de pérenniser la place de Vlisco dans le cœur des consommateurs congolais.  Je terminerai enfin par le souhait de repérer et de créer des talents, tant au sein de Vlisco Congo que dans notre réseau de distribution.

En tant que directrice générale, quels principes guident vos décisions ?

Intérêt social, rigueur intellectuelle, et collégialité  sont les maîtres mots de chaque décision que je prends.

Quel sens accordez-vous au mot leadership et comment le mettez-vous en pratique avec vos collaborateurs directs ?

J’essaie, dans la mesure du possible, d’être en dialogue constant avec mes collaborateurs. Ceci est nécessaire pour faire comprendre ma vision, mais surtout pour intégrer leurs avis relatifs à celle-ci.  Obtenir l’adhésion de mes équipes sur les décisions stratégiques les plus importantes est pour moi fondamental.  En outre,  mon leadership est indissociable de ma volonté de créer des experts et d’autres leaders autour de moi.  La formation continue est une priorité.

Quels sont les challenges auxquels vous faites face et quelle est la partie la plus difficile de votre travail ?

Mon plus grand challenge, sans doute commun à plusieurs dirigeants, est sans nul doute celui de trouver le bon équilibre entre gestion opérationnelle à court et moyen terme qui implique réactivité et parfois immédiateté ainsi que réflexion stratégique à long terme qui implique distance, recul et prises de risque.

Le second challenge relève de la réalité opérationnelle de la RDC qui doit encore s’améliorer à de nombreux égards. Des réformes drastiques sont nécessaires pour améliorer le climat des affaires en RDC et ainsi permettre une véritable éclosion sereine de l’ensemble des opérateurs économiques actifs en RDC.

Comment arrivez-vous à gérer votre stress de dirigeante ?

La méditation et le recul sont les meilleurs moyens de gérer le stress inhérent à cette fonction.

Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu sur le plan professionnel?

« Ne pas confondre vitesse et précipitation ».

Comment Vlisco/RDC va-t-elle évoluer? Quelles sont vos ambitions?

Vlisco RDC souhaite continuer à entretenir des liens privilégiés avec son réseau de distribution.  Nous allons investir à tous les niveaux. Formation des commerçantes du marché local en leadership et entreprenariat. Formation de notre éco système, boutiques, vendeuses. En outre, nous prévoyons, en 2022, la création d’une fondation Vlisco dans la ville de Goma pour commencer ; fondation qui va, elle aussi employer du personnel et contribuer à l’autonomisation des jeunes femmes précarisées de Goma.

Nous sommes résolus à moderniser nos canaux de distribution.

 

Patrick Ndungidi
Journaliste et Storyteller
https://africanshapers.com

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *