Le médecin congolais fait partie des deux lauréats, avec le Dr Francis Gervase Omaswa (Ouganda), de la troisième édition de ce prix « Hideyo Noguchi Africa » décerné par le gouvernement japonais le 25 avril.
Le troisième prix Hideyo Noguchi pour la recherche médicale en Afrique, explique-t-on, a été décerné au docteur Jean-Jacques Muyembe-Tamfum pour sa contribution exceptionnelle à la recherche médicale notamment ses recherches sur le virus Ebola et d’autres virus mortels, ainsi que sur les efforts déployés pour former plusieurs personnes en vue de lutter contre ces maladies.
Le gouvernement japonais a créé le Hideyo Noguchi Africa Prize en juillet 2006 à la mémoire du Dr Hideyo Noguchi (1876-1928) partisan de la recherche médicale en Afrique. Le prix est décerné tous les cinq ans. Le premier a été décerné en 2008 et le 2ème en 2013.
Il se compose de deux catégories: la recherche médicale rendant hommage à une personne et les services médicaux rendant hommage à une personne ou à une organisation. Le bénéficiare remporte notamment la somme de 1,18 million de dollars.
Plus de 50 ans de recherche médicale
Né en RDC en 1942, Jean-Jacques Muyembe-Tamfum est titulaire d’un diplôme de médecine de l’université de Lovanium (actuelle université de Kinshasa) et d’un doctorat en médecine / virologie du Rega Institute for Medical Research de l’université catholique de Louvain (Belgique). Il est actuellement le directeur général de l’institut national de recherche biomédicale (INRB) en RDC et professeur de microbiologie médicale / virologie à la faculté de médecine de l’université de Kinshasa.
Le Dr. Jean-Jacques Muyembe-Tamfum évolue depuis plus de 50 ans dans la recherche médicale et la formation en RDC. En 1976, il a découvert l’existence d’une maladie inconnue dans son pays, recueillit des échantillons de sang et de tissus dans des conditions dangereuses et les communiqua à l’Institut de médecine tropicale de Belgique, où le virus Ebola fut découvert. Depuis 1976, le Dr Muyembe-Tamfum est en première ligne de la lutte contre Ebola et plusieurs autres maladies, en contribuant à la recherche sur les vaccins, en mettant au point un traitement antisérum et en formant une nouvelle génération de dépisteurs de maladies et de scientifiques congolais de laboratoire.
Un scientifique de terrain
En 1976, Le Dr. Jean-Jacques Muyembe-Tamfum s’est rendu à Yambuku, un petit village du nord de la RDC, dans l’ex province de l’Equateur, où le premier foyer de la maladie à virus Ebola s’est déclaré en 1976, et il a alerté à ce sujet. Depuis lors, il a travaillé comme expert en matière de lutte contre le virus Ebola. Il a été nommé président du Comité scientifique et international contre les épidémies de maladie à virus Ebola à Kikwit (Ouest de la RDC) en 1995 et a mené des études approfondies sur cette épidémie, notamment en examinant les dossiers de l’hôpital et en interrogeant les survivants.
Il a constaté que les épidémies d’Ebola à Kikwit étaient causées par une infection nosocomiale. En tant que mesures de contrôle de la maladie, il a préconisé l’isolement des patients dans un service de quarantaine, la distribution d’équipements de protection aux travailleurs de la santé et les membres de la famille, la distribution de matériel éducatif sanitaire, l’ensevelissement du défunt par une équipe formée. Des actions qui se sont avérées efficaces. En outre, il a présenté une vision socioculturelle visant à contrecarrer la transmission du virus Ebola. Il a reconnu que la pratique traditionnelle de l’inhumation était l’une des principales causes de transmission de la maladie dans la communauté.
Par la suite, il a expliqué aux dirigeants locaux comment la maladie se transmettait et a fourni aux familles des gants et des équipements de protection. Ces mesures introduites sous sa direction se sont révélées efficaces lorsque la RDC a maîtrisé l’épidémie dans les trois mois. En appliquant ces expériences, il a été consultant pour l’OMS, participant à la lutte contre les épidémies de virus Ebola et de Marburg dans d’autres pays.
Une contribution internationale
La contribution scientifique du Dr Muyembe-Tamfum ne se limite pas à la maladie à virus Ebola, elle couvre également un large éventail de maladies. Le médecin, en tant que directeur de l’INRB, il a renforcé les capacités de cet institut de recherche médicale dans divers domaines . Il a mis en place une infrastructure de recherche et de surveillance des maladies évitables par la vaccination telles que la poliomyélite, la rougeole et la fièvre jaune, sur les zoonoses telles que le monkeypox et la fièvre hémorragique virale, et sur les infections respiratoires aiguës telles que la grippe et la résistance de la tuberculose et des entérobactéries aux antibiotiques. Il a reçu le Prix Christophe Mérieux de l’Institut de France en 2015 pour ses grandes réalisations et ses contributions dans le domaine de la recherche sur les maladies infectieuses en Afrique.
Un grand formateur
La contribution du Dr Muyembe-Tamfum à l’éducation est également remarquable. Après avoir servi à la faculté de médecine de l’université de Kinshasa pendant plus de 40 ans, il a formé plus de 1000 jeunes chercheurs en RDC. En outre, il est depuis 1998 directeur général de l’INRB, qui est chargé de la formation des chercheurs en biomédecine. De nombreux diplômés de ses programmes jouent désormais un rôle essentiel dans la lutte contre les maladies infectieuses dans le monde. Il a également contribué à la création de l’école de santé publique de Kinshasa (ESPK, RDC).
Le Dr Muyembe-Tamfum a créé des réseaux et établi des partenariats internationaux hors d’Afrique, tels qu’avec le Centre international de recherches médicales de Franceville (Gabon) ; l’Institut national des maladies transmissibles (Afrique du Sud) ; l’école de médecine vétérinaire de l’université de Zambie ; l’Institut de recherche médicale Noguchi Memorial (Ghana) ; l’Institut de médecine tropicale, Anvers (Belgique) ; l’Institut de recherche pour le développement, Université de Montpellier (France) ; l’Institut Robert Koch, Berlin (Allemagne) ; l’US Center for Disease Control et Prévention Atlanta (États-Unis) ; les Instituts nationaux de la santé (États-Unis), l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA) ; l’Agence de la santé publique du Canada (Canada) et les institutions de recherche japonaises, notamment l’Institut national des maladies infectieuses (Tokyo), Hokkaido Université (Sapporo) ; l’Université de Nagasaki (Nagasaki) et le Centre national de la santé mondiale et de la médecine (Tokyo).