Youyou Mwadi Mabika:«Il faut que d’autres joueuses congolaises aillent aussi jouer en WNBA»

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Ancienne star de la Women’s National Basketball Association (WNBA), ligue américaine professionnelle de basket-ball féminin, où elle a joué pendant 11 ans et remporté deux titres de championne, Youyou Mwadi Mabika est aujourd’hui l’une des ambassadrices de la WNBA, engagée dans la promotion du basketball dans différents coins du monde notamment en Afrique. Protégée de Mutombo Dikembe, son mentor, qui l’a aidée à intégrer la WNBA, après les jeux olympiques de 1996, Youyou Mwadi s’apprête également à lancer sa Fondation en RDC. Objectif: promouvoir le basketball auprès de la jeunesse féminine en milieux scolaire et universitaire.

 

Africanshapers: pourriez-vous nous rappeler votre parcours sportif ?

Youyou Mwadi : j’ai commencé le basketball dès 1989. J’étais encore à l’école. J’ai joué au BC Tourbillon de Lemba. Par la suite, je suis allée en équipe nationale, où on s’est qualifié pour les jeux olympiques (J.O) d’Atlanta de 1996. Grâce à ma prestation aux J.O et avec l’aide de Mutombo Dikembe, j’ai intégré la WNBA en 1997, où j’ai joué 11 saisons avec les Sparks de Los Angeles. Pendant cette période, je jouais aussi en Europe, car la saison de WNBA ne durait que 3 mois. Je jouais donc les 9 autres mois en Europe.

Quel bilan pourriez-vous faire de votre carrière, en tant que sportive de haut niveau ?

Le bilan, c’est quand même la participation aux J.O d’Atlanta en 1996, mon intégration dans la toute première année de la WNBA et puis mes 2 titres de championne de WNBA en 2001 et 2002.

Justement, vous avez été championne de la WNBA en 2001 et 2002. Quel regard portez-vous sur ces deux saisons ? C’étaient les meilleures de votre carrière ?

Oui, bien sûr ! La WNBA regroupe les meilleures joueuses du monde entier, tout comme la NBA regroupe les meilleurs chez les hommes. Donc, gagner le titre, c’est être championne du monde, en quelque sorte. C’est vraiment une consécration, une fierté. C’est vraiment les 2 meilleures années de ma carrière.

Quelles sont les leçons que vous avez apprises en jouant pendant 11 ans au sein de la WNBA, dont vous êtes aujourd’hui une référence ? Que retenez-vous de cette riche expérience ?

Ce que j’ai appris, c’est que si on travaille avec acharnement et discipline, on peut arriver au sommet. Le secret de la réussite, c’est le travail. Pas seulement pour soi-même, mais pour l’équipe, pour la famille, pour la communauté. C’est vraiment ça que j’ai compris.

Comment décririez-vous votre style de jeu, à l’époque où vous étiez joueuse de basketball ?

Mon poste était ailière et j’essayais de jouer un peu comme Michael Jordan, en étant polyvalente. J’étais forte en pénétration, dans les shoots, les tirs à 3 points… et surtout mon esprit kinois faisait que je n’avais pas peur de prendre le match en main quand il le fallait.

Vous êtes actuellement ambassadrice pour la WNBA. En quoi consiste ce travail et quelles sont les activités que vous menez ?

Oui, en effet, nous sommes appelées par la WNBA pour promouvoir le basketball dans différents coins du monde. Et j’ai déjà été invitée plusieurs fois dans des pays africains tels que le Ghana et le Rwanda. Nous nous employons à montrer aux jeunes les fondamentaux du basketball, dans le cadre des WNBA clinics. En même temps, nous leur inculquons les valeurs du sport telles que l’esprit d’équipe, la combativité et les respect du règlement.

Vous préparez le lancement de votre Fondation. Quel sera son objectif ainsi que sa particularité par rapport aux Fondations qui existent déjà ?

La Fondation Mwadi Mabika a pour objectif principal la promotion du sport, spécialement le basketball au sein de la jeunesse féminine en milieux scolaire et universitaire. C’est différent de ce qu’on voit la plupart du temps ici. Il y aura aussi beaucoup d’œuvres caritatives, mais l’objectif principal reste la promotion du basketball chez les jeunes filles.

Comment analysez-vous le basketball féminin aujourd’hui en RDC ? Quels sont les défis ?et quelles sont les améliorations à apporter pour que la RDC puisse, à nouveau, gagner des titres internationaux ?

L’analyse est désastreuse. Le basketball, dames ou messieurs, est pris en otage par les mêmes gens qui ont conduit ce sport dans une descente aux enfers. Qui sont-ils ? C’est ceux-là qui ne veulent pas laisser la place à d’autres pour ramener le basket dans le haut niveau d’antan. Le défi majeur, c’est rehausser le niveau de ce sport. Pour cela, il faut de bons dirigeants qui ont une vision et qui mettent les moyens pour le développement du basketball. Il faut également des infrastructures, des terrains… Il y a un manque criant de terrains dans les quartiers, dans les écoles, dans les communes, dans les villes et même dans le pays, car la RDC n’a pas un seul terrain qui peut accueillir une compétition internationale, c’est triste.

Comment votre Fondation compte-t-elle participer à ce renouveau du basketball féminin, en particulier, et au sport féminin en RDC, en général ?

Justement, c’est ce qui m’a motivée à créer ma Fondation. C’est la question que je me suis posée au départ. Je ne prétends pas venir avec une solution magique, ni changer les choses moi-même. Mais, je vais entreprendre des actions pour attirer le regard des dirigeants sur la situation du basketball, surtout féminin. Il faut que demain, d’autres joueuses congolaises aillent aussi jouer en WNBA. Mais, pour ça, il faut un travail commun. Les dirigeants doivent faire leur travail, les gouvernants ont leur part de travail, et, nous avons aussi notre part. Ensemble, on peut relever le basketball, chacun de nous a son rôle à jouer, mais il faut se mettre au travail dès maintenant pour relever ces défis. Et ça commence déjà au niveau des écoles. Il n’existe même plus de tournoi interscolaire, de compétitions intercommunales ou un championnat national de qualité, alors que c’est important. Il faut aussi que la RDC se dote d’infrastructures répondant aux standards internationaux. C’est inconcevable que nos équipes soient déclarés forfaits dans une compétition internationale par manque de terrain approprié. Et, moi je vais faire ma part.

Vous avez joué pour BC Tourbillon en RDC. Comment se porte ce club aujourd’hui et quelles relations avez-vous gardé avec le club ?

Le BC Tourbillon est en deuxième division actuellement. Les dirigeants de l’équipe ont voulu refonder l’équipe en jetant de nouvelles bases. Donc, l’équipe travaille avec de nouvelles recrues et c’est une bonne chose que de se refonder parfois. On les suit de près en tant qu’ancienne et on espère que l’équipe va retrouver son prestige.

Que représentait pour vous le fait de jouer en équipe nationale de la RDC, au moment où étiez déjà une star de la WNBA et que vous auriez peut-être pu jouer pour l’équipe nationale des USA ?

Je suis congolaise, de père et de mère (rires)… et j’ai toujours été fière de porter les couleurs nationales. Participer aux JO d’Atlanta pour le compte de mon pays a été une grande fierté pour moi et c’est là que j’ai été remarquée pour intégrer la WNBA.

Quelles sont les qualités et les valeurs requises pour être une sportive de haut niveau ?

Le travail dur, la discipline, la concentration, la patience aussi.

© Jesse D. Garrabrant /WNBAE/Getty Images

Informations supplémentaires

Un joueur ou une joueuse préféré(e) de basketball ?

Michael Jordan

Un coach préféré ?

Michael Cooper

Mentor?

Dikembe Mutombo

Une équipe préférée ?

L.A Lakers et L.A Sparks

Le geste préféré en basketball ?

Crossover (NDLR : Dans le basket-ball, le crossover est une variation du dribble, accompagnée d’un changement de main dans le but de passer un adversaire direct. Il en existe plusieurs variantes.)

Ce qui vous motivait quand vous étiez joueuse ?

Ma famille… ma mère surtout !

Une qualité ?

J’ai bon coeur à ce qu’il parait

Un défaut ?

Je suis très méfiante

Citation préférée ?

No pain, no gain

 

Patrick Ndungidi
Journaliste et Storyteller
https://africanshapers.com

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